La prise en compte des enjeux et des caractéristiques du site

Contribution de Bretagne Vivante
Description
CONTRIBUTION Bretagne Vivante
Rives de Loire, un nouveau quartier du centre ville tourné vers la Loire Couëron
Puisque ce projet est présenté comme un “projet d'anticipation et de transformation de la ville du futur”, nous allons exposer, ici, les points qui ont été oubliés et qui nous paraissent importants à retenir pour se projeter dans l’avenir à Couëron en considérant les rives de Loire comme un milieu vivant, sauvage et en perpétuel mouvement.
Reprenons d’abord la citation de Joe Wheaton : “Sur la planète Terre, une rivière vivante s'entoure de milieux humides qui protègent la vie. Pourtant, nous lui avons pris ces milieux pour déployer nos villes et agriculture industrielles.”
La Loire est reconnue comme étant le seul fleuve sauvage français. Or, il est endigué de Nevers à Saint Nazaire, présentant des berges artificialisées par de nombreux sites industriels datant du 19ème siècle. Que reste-t-il de ses richesses environnementales, et de ses différentes composantes, lit majeur, lit mineur, milieux humides, nappe alluviale, rypisylve ?
En page 1 de la présentation, il est rappelé que “Ce projet a dû tenir compte des contraintes inhérentes au lieu : celle d’une ancienne friche industrielle et d’un enclavement par une falaise.” Il n’est nulle part évoqué la contrainte naturelle, à savoir les milieux humides entourant cette “rivière vivante”, comme cité plus haut par Joe Wheaton.
Les aménagements du fleuve et les industries du 19ème siècle ont fait disparaître les milieux humides bordant la rivière faisant abaisser la nappe alluviale, asséchant le lit majeur. De nouveaux paramètres, au 21ème siècle, sont à prendre en compte, à savoir l’effondrement de la biodiversité, le changement climatique et la montée des eaux.
Nous pensons effectivement qu’il est temps de penser différemment, (page 2 de la présentation), d’anticiper, de transformer ces milieux industriels pour rétablir des milieux naturels et rendre au fleuve l’espace dont il a besoin. Il faudrait que le site de la ZAC des rives de Loire :
- soit dépollué et désartificialisé,
- retrouve sa fonction de milieu naturel,
- puisse faire face aux effets du changement climatique, à savoir dans ce contexte, la montée des eaux, en l’intégrant au projet Adapto de l’estuaire.
POLLUTION DES TERRES
Comme beaucoup de communes de l’estuaire de la Loire, “Couëron a été marqué par une activité industrielle liée à la qualité de la situation en bord de Loire qui facilitait le transport des marchandises (verrerie royale, briquetterie, biscuiterie). Le site de Rives de Loire accueille à partir de 1861 les Fonderies et Laminoirs de Couëron. Elles produisaient du plomb et des dérivés de ce métal, abandonnés dans les années 1930 au profit du cuivre et du laiton.” (p.2 de la présentation)
Au 19ème siècle, les rives de Loire ont été industrialisées sur un site naturel, à l’intérieur du lit majeur du fleuve. Aujourd’hui les berges sont encore artificielles, composées de remblais industriels, et caractérisées par la présence d’enrochements créant des rives abruptes.
La dépollution du site a commencé en 2005 dans les jardins situés sur la falaise par l'extraction des terres polluées au plomb. Elle n’a pas été poursuivie pour différentes raisons, dont l’une est probablement financière, du fait du coût trop élevé des opérations . Le site des rives de Loire n’a, lui, pas été concerné par la dépollution. Pourtant ce sol contient du plomb et d’autres métaux lourds, mais aussi des hydrocarbures.
“Une dépollution à poursuivre pour répondre durablement aux usages de demain Des investigations pollution ont été réalisées entre 1996 et 2016. Les solutions d’évacuation ou de confinement des terres, selon les types de pollutions, doivent être approfondies techniquement dans les mois à venir, permettant un usage sain du site : → Recouvrement minéral ou avec de la terre végétale, permettant les usages → Préservation des espaces, limitant les usages à des cheminements contenus (p.2 de la présentation)
Nous nous interrogeons :
- Les terres extraites sont entassées sur la falaise, sans être dépolluées, à l’endroit où un parc est prévu. Quel est leur devenir ? Comment peut-on aménager un parc sur des terres polluées au plomb ?
- Pour la partie basse de la falaise, où aucune excavation des terres polluées n’a été faite, d’après l’extrait cité il semblerait que les solutions de dépollution ne sont pas encore trouvées, elles doivent être “approfondies”. Il est évoqué une solution d’évacuation possible. Comment est-elle envisagée ? Le stockage sur site, comme cela a déjà été fait en 2005, ne fait que repousser le problème et pénaliser les générations futures.
- La solution de confinement, en limitant au maximum l'accès physique aux terres polluées, n’est pas encore finalisée. Les solutions ne sont donc pas encore abouties et les problèmes, déjà posés en 2005, ne sont toujours pas résolus. Le projet ne peut pas commencer en l’état.
DISPARITION DES MILIEUX NATURELS ET DE LA BIODIVERSITÉ
Le nouveau quartier devra s’inscrire en douceur dans un contexte paysager riche, et en valoriser ses composantes multiples :
→ topographie et vues,
→ formations végétales qui se sont progressivement installées sur le site. (p.3 de la présentation)
Une friche présentant aujourd’hui une biodiversité «ordinaire» Cet ancien site industriel est depuis la démolition des derniers bâtiments, intervenue dans les années 2000, une friche urbaine. Il est aujourd’hui concerné par des zonages Natura 2000 et ZNIEFF. Les enjeux sont concentrés sur une bande centrale d’Est en Ouest, comprenant la falaise (chiroptères, lézards de murailles...).
→ Il s’agira dans le cadre du projet de composer avec ces enjeux.
→ L’état de la partie haute du site sera amélioré. (p.2 de la présentation)
Nous apprécions tout le travail d’inventaire réalisé et reconnaissons la prise en compte des enjeux environnementaux sur le site. Nous rappelons que les milieux naturels sont en forte régression et que la biodiversité reste toujours menacée par la conversion des milieux naturels en milieux artificiels. Ceci entraîne toutes sortes de maux et de perturbations sur les espèces inféodées à ces milieux, et ici sur la bonne santé du fleuve.
Du fait des classements Natura 2000 et ZNIEFF, nous pensons, comme cité dans la présentation que “Le nouveau quartier devra permettre une certaine conservation de la biodiversité qui s’y est développée, tout en y engageant une renaturation”. Alors pourquoi choisir comme prétexte l’aménagement d’un nouveau quartier pour conserver, voir renaturer un milieu naturel intéressant ? Nous déplorons que l’enjeu environnemental ne soit pris en compte que sous un aspect paysager.
Plus loin, nous retrouvons encore :
“Une multitude de formations végétales comme base de la composition du quartier"
Le site, à l’articulation de la trame verte urbaine et la trame de nature des rives de Loire, présente plusieurs entités végétales intéressantes :
→ le quai boisé, à conforter.
→ le front de taille, autour de différentes séquences, à mettre en scène à l’articulation ville haute - ville basse.
→ une partie haute, plus enfrichée, mais présentant une végétation spontanée à valoriser
Une trame nature à amplifier, des connexions écologiques à préserver, et une nouvelle qualité paysagère à développer
→ préserver la dualité milieux ouverts (prairies) et milieux fermés (boisements), qui revêt un rôle majeur dans la conservation de la fonctionnalité des corridors écologiques en lien avec les paysages de Loire.” (p.3 de la présentation)
Ainsi le site est composé d’une mosaïque de milieux favorables au développement et à la richesse de la biodiversité, et serait de nouveau perturbé par une nouvelle transformation liée aux activités humaines.
1- Falaise et chauve souris
La topographie du site en terrasse sur la Loire est singulière. Elle abrite une biodiversité ordinaire, mais néanmoins, une partie du site est à enjeux et comporte des cavités. Ni l’espèce, ni la période de fréquentation des cavités par les chauves souris n’est précisée : Repos hivernal ? Mise bas au printemps ? Développement des nichées en été ? Période de reproduction automnale ? Or toutes ces périodes correspondent à un moment essentiel du cycle de vie des chauves-souris et de leur survie.
Nous savons bien que certaines espèces de l’avifaune s'accommodent très bien de la proximité avec l’homme comme les mésanges, les moineaux, etc. Les chiroptères sont beaucoup plus sensibles. L’impact du dérangement a-t-il été évalué ? Oui, puisqu’il faudra “composer avec ces enjeux”. Mais pourquoi ne pas permettre aux espèces toute quiétude et un milieu naturel non perturbé par des activités humaines ?
2- Rives de loire
“Un site de bord de Loire
Le site est concerné par la zone b du Plan de Prévention des Risques naturels d’Inondation (PPRI), dont les principales dispositions sont :
→ niveaux habitables possibles au-dessus de la cote de référence (cote NGF 5.50m).
→ sous-sols interdits, conception semi-enterrée envisageable.
Au-delà, la Ville a fait le choix qu’il n’y ait pas de logements en RdC. La contrainte PPRI devenant une opportunité pour penser différemment les accès, les parties communes, etc.” (p.2 de la présentation)
Les contraintes PPRI montrent bien qu’il existe un risque réel de crues et d'inondations.
D’ailleurs, ces crues et inondations pourraient être aussi une source supplémentaire de pollution de la Loire en entraînant les polluants stockés dans le sol.
Puisque cette contrainte PPRI existe, cela induit que la ZAC des rives de Loire serait construite dans un environnement naturel,
- d’une part en occupant le lit majeur de la Loire, qui par définition est un “Espace occupé temporairement par les rivières lors du débordement des eaux en période de crues” (géorisques.gouv). Les travaux d’aménagement du fleuve liés aux constructions et à la navigation ont fait baisser drastiquement les niveaux d’eau et la nappe alluviale, ce qui a fortement diminué l’ampleur des inondations. Mais la tendance actuelle est de rendre leur espace vital aux fleuves.
- D’autre part, ces constructions seraient situées en contrebas d’une falaise, “à la topographie singulière en terrasse”,et elles seraient impactées par les eaux de ruissellement venant du haut de cette falaise. Les inondations par ruissellement sont de plus en plus présentes du fait du déboisement/défrichement, de l'imperméabilisation des sols au niveau du réseau routier et de l’urbanisation croissante. Nous sommes dans ce cas de figure sur le haut de la falaise. On se souvient des forts orages de l’année 2013, qui ont entraîné la chute du mur en pierre de la maison située à côté de la salle de l’Estuaire. Un bassin d’orage a d’ailleurs été redimensionné pour faire face à ces forts écoulements d’eau pluviales.
Le PPRI, Plan de Prévention du Risque Inondation, outil de gestion des risques, permet de sécuriser les personnes et leurs biens. Mais quelle protection apporte-t-on au milieu naturel ?
Ne serait-ce pas l’occasion de rendre à la Loire son lit majeur et ses milieux humides adjacents ?
Nous pensons donc, comme il est écrit dans la présentation, qu’il est temps de penser différemment, mais en bannissant l’urbanisation et les aménagements dans les lits majeurs des fleuves et en particulier celui de la Loire. Les prévisions
ADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
Citons ici, deux extraits du SDAGE 2022-2027 auxquels on peut se référer :
https://donnees-documents.eau-loire-bretagne.fr/files/live/mounts/midas/Donnees-et-documents/Sdage/Projet_enjeux_bassin_LB_
- “Le Sdage Loire-Bretagne 2022-2027 renforce la prise en compte transversale du dérèglement climatique sur l'ensemble du document. Des modifications plus structurantes ont été apportées aux chapitres relatifs à la gestion des prélèvements (chapitre 7), à l'aménagement des cours d'eau dans leur bassin versant (chapitre 1), à la préservation des zones humides (chapitre 8) et du littoral (chapitre 10), qui sont des domaines particulièrement sensibles aux impacts du dérèglement climatique. C'est également dans leurs champs d'actions que se trouvent les solutions les plus pertinentes pour l'adaptation des territoires et l'atténuation du dérèglement climatique.
Les objectifs du Sdage Loire-Bretagne 2022-2027 concordent avec les objectifs d'adaptation au dérèglement climatique et permettent d'améliorer la résilience des milieux et des usages. En revanche, dans l'identification et la mise en oeuvre des actions, l'adaptation au dérèglement climatique est encore faiblement perçue comme un objectif.
L'atténuation est cependant peu ou pas intégrée aux réflexions à ce stade.
Enfin, le Sdage Loire-Bretagne 2022-2027 conserve une approche thématique qui rend plus difficile la prise en compte d'enjeux ou de solutions transversales.”
- “3. L'adaptabilité
Face au constat de la forte incertitude des dommages du dérèglement climatique, et le fait que la connaissance évolue rapidement, il est indispensable de pouvoir s'adapter en élaborant des dispositifs évolutifs. Dans un futur dont l'évolution est incertaine, les normes ou les règles définies dans le présent doivent pouvoir être réorientées pour ne pas risquer de devenir un élément de mal-adaptation. L'adaptabilité territoriale doit également être renforcée pour prendre en compte la spécificité locale des impacts du dérèglement climatique.”
Ce projet ne nous semble , en aucun cas , faire preuve de l’adaptabilité préconisée dans le SDAGE.
CHANGEMENT CLIMATIQUE ET ADAPTO
Pourtant, d’autres communes de l’estuaire ont ou vont bénéficier d’un programme pour s’adapter au changement climatique ; il s’agit du projet ADAPTO.
Ce projet ADAPTO Estuaire, initié par le conservatoire du littoral, interrogeant les effets du changement climatique, a déjà démarré sur la commune de Corsept et va se poursuivre sur d’autres sites : Donges, Buzay et Massereau/Migron.
“Dans la lignée des autres projets Adapto, il s’agit donc de s’interroger ensemble sur le devenir de l’estuaire à l’aube du changement climatique et des aménagements envisagés (valorisation des marais, renaturation…), le tout en adoptant une approche pluridisciplinaire et transversale. A quoi ressemblera le paysage de demain ? Quelles activités pourront y prendre place ? Quelles espèces animales et végétales s’y développeront ? sont quelques-unes des questions qui se poseront, et auxquelles nous tâcherons de répondre.”
L’objectif est de définir des solutions d’adaptation permettant une meilleure résilience du territoire et valorisant les espaces naturels littoraux comme alliés sur ces sujets.
(…) Lire la suite de la proposition dans le document joint ci-dessous.